
Le matin, tout semble trop lent.
Je suis assis avec Mélisse près de notre maison. Elle cherche son galet fétiche, celui qu’elle garde toujours avec elle. Moi, j’ai une découverte bien plus passionnante à lui raconter : mon secret.
"J’ai trouvé une cachette sous un rocher près de la rivière," je murmure, les yeux brillants.
Mais Mélisse ne semble pas aussi excitée que moi. Elle me sourit doucement et répond : "Tu me montreras un jour ?"
Un jour ? J’aimerais y aller maintenant !
Mais il faut se rendre à l’école avant la cloche, et nous devons partir. Alors, je prends le temps de remarquer tous les détails qui mènent au rocher qui cache la cachette de mes rêves. J'observe les arbres, les courbes de la rivière. Je prends le temps d'absorber tous les sons et les odeurs: les galets mouillés, le vent, les sons de la forêt et les bruits du village qui se réveillent.
En arrivant dans la cour de l’école, je trouve un coin tranquille sous mon grand chêne préféré et sors mon cahier. Je dessine une carte, avec des petits détails : le creux dans l'arbre qui borde la rivière près du rocher, les buissons, la pierre plate parfaite pour s’asseoir. Mon plan devient plus précis à chaque coup de crayon.
Quelques élèves s’agitent autour de moi. Capucine joue à la marelle, Azurin s’amuse à lancer des feuilles en l’air. J’entends les éclats de rire de Trèfle et Luzerne qui courent en rond. Tout le monde semble occupé… sauf moi. Moi, je pense à ma cachette.
En classe, tout est trop long.
Madame Rivière - à l'école, je ne peux pas l'appeler maman - parle à la classe des plantes qui poussent au bord de l’eau. Normalement, j’aime bien les leçons sur la nature et l'environnement de notre belle forêt, mais aujourd’hui, mon esprit est ailleurs. Je gribouille la forme de ma cachette sur mon cahier, et je m'imagine m'y rendre avec énergie.
Mielle, à côté de moi, me donne un coup de coude. "Qu’est-ce que tu dessines ?"
"Rien," je réponds en refermant mon cahier. C’est mon secret, pour l’instant.
Pendant la récréation, Capucine veut jouer à cache-cache, Azurin me parle d’un nouveau jeu, mais moi, je n’arrête pas de penser à mon plan.
Quand enfin la cloche sonne pour le déjeuner, mon cœur bondit. C’est le moment parfait pour filer vers ma cachette ! Mes pattes me démangent déjà. Je suis prêt à courir…
Mais juste avant que je puisse partir, Madame Rivière me rappelle :
— Sauge, n’oublie pas ton repas.
Je soupire. Bien sûr. Le repas d’abord.
Je m’assois avec les autres. Mon panier me semble trop grand, mon pain trop croustillant, mes carottes trop longues à mâcher. Mielle rigole parce qu’une graine est tombée dans ma fourrure. Mais moi, je compte les secondes. Je voudrais que le temps avance plus vite.
Les minutes s’étirent comme du miel qui coule lentement. Tout semble ralentir… même le vent. Il fait frissonner doucement les feuilles au-dessus de nos têtes. La lumière du soleil passe entre les branches, dessinant des ombres sur la table.
Le bruit des autres qui mangent, des rires au loin, le crissement du pain… tout devient un peu flou autour de moi. J’essaie de me concentrer sur ma respiration. Inspirer… Expirer… J’ai appris ça quand je suis trop impatient. Parfois, attendre fait grandir le plaisir.
Je ferme les yeux un instant. J’imagine la rivière, les pierres rondes, l’arbre penché, le rocher qui cache tout. Je me rappelle comme l’air y sent la mousse et la menthe sauvage. Rien que d’y penser, mon ventre se calme un peu.
Et puis, je souris. Parce que je sais que ma cachette m’attend. Elle ne s’envolera pas.
Finalement, la dernière cloche sonne. Cette fois, je me lève doucement. Je n’ai plus besoin de courir.
Les sentiers de la forêt sont plus beaux quand on a attendu aussi longtemps. Je sens chaque pas. Le sol est un peu humide, les aiguilles de pin font crr crr sous mes pattes. Un oiseau s’envole d’un buisson. Il me regarde, comme s’il savait que j’allais quelque part de spécial.
La lumière est douce. L’air sent le bois, le silence et les secrets.
Quand j’arrive enfin, l’endroit est encore plus beau que dans mon souvenir. Mon cœur bat vite, mais c’est un battement calme maintenant… heureux.
Le sol est moelleux. L’eau clapote contre les pierres. Une libellule passe en zigzag. Je m'assois doucement.
Je reste là un long moment, à écouter, à respirer. Je ne pense plus à rien d’autre. Je suis juste… ici.
Et dans le calme de ma cachette, je comprends quelque chose. Attendre, ce n’est pas seulement difficile. C’est aussi ce qui rend ce moment plus doux.
Peut-être… qu’un jour, je la montrerai à quelqu’un. Mélisse, sûrement! Mais, juste quand ce sera le bon moment.
Pas maintenant. Mais un jour.
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