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Retour à la forêt

Épisode 2 : Le galet du ruisseau

L’odeur du pain chaud flotte encore dans l’air alors que je referme doucement la porte de la boulangerie derrière moi. Mes pattes sont encore tièdes du sol en bois du fournil, et le contraste avec la fraîcheur matinale me fait frissonner légèrement.

Je serre mon petit pain entre mes doigts. J’aime ce moment du matin, juste avant l’école, où tout est encore silencieux, où le monde appartient à ceux qui savent l’écouter.

Le sentier qui longe la rivière est baigné dans une douce lumière dorée. L’air est frais, et la forêt s’éveille lentement. L’eau coule tranquillement, chuchotant ses histoires aux pierres qu’elle caresse.

J’avance doucement, mes pas feutrés sur la mousse épaisse. L’air sent bon la terre humide et la rosée du matin. Une petite boule se forme dans mon ventre, comme à chaque matin. Aujourd’hui, il y a une nouvelle leçon à l’école. On nous a promis un exercice spécial avec le professeur Chardon. Il est toujours enthousiaste, toujours un peu éclaboussé de peinture. J’aime apprendre, mais j’ai toujours cette petite appréhension. Est-ce que je vais bien faire ? Est-ce que je vais tout comprendre ?

Chardon a une façon bien à lui de voir le monde, un mélange de chaos et de créativité. Il nous encourage à essayer, à explorer sans peur de nous tromper. Peut-être que l’exercice d’aujourd’hui ne sera pas si intimidant après tout...

Pour me rassurer, j’ai une mission bien précise : trouver le galet parfait. Pas trop gros, ni trop petit. Lisse, rond, et juste assez lourd pour tenir dans ma patte sans rouler. Un galet comme un petit trésor. Un galet pour me rappeler que peu importe où je suis, le ruisseau est toujours là.

Je m’accroupis près de l’eau, laissant le bout de mes doigts plonger dans le courant frais. Une petite vague vient caresser ma patte. Je souris. C’est comme si la rivière me saluait, m’encourageant dans ma quête matinale. Chaque pierre raconte une histoire, chaque galet a roulé ici porté par le temps. Peut-être que celui que je cherche est tout près, juste sous la surface, attendant d’être découvert.

Un bruit derrière moi me tire de ma contemplation. Je souris avant même de me retourner. Sauge. Mon petit frère arrive en courant, toujours un peu trop vite, toujours à la recherche d’une nouvelle aventure.

« Mélisse, regarde ! J’ai trouvé une cachette secrète sous ce rocher ! »

Je lève les yeux vers lui. Son énergie déborde, il sautille d’une pierre à l’autre, insouciant et léger comme un souffle de vent. Moi, je préfère prendre mon temps.

Je fais rouler un galet lisse dans ma paume. Tiède sous mes doigts mouillés. Le galet parfait.

Sauge me regarde avec curiosité. « Pourquoi tu cherches toujours un galet ? » demande-t-il en penchant la tête.

Je réfléchis un instant. Comment expliquer que ce simple caillou me donne un sentiment d’équilibre ? Qu’il est une constante dans ma vie entre deux maisons ?

Je hausse les épaules avec un sourire doux. « Parce que j’aime en avoir un avec moi. Comme un souvenir du ruisseau. »

Je lève le galet devant mes yeux, observant sa surface polie par le temps et l’eau. Il est doux, rassurant. J’aime imaginer le voyage qu’il a parcouru avant d’arriver ici, les courants qui l’ont porté, les tempêtes qui l’ont secoué. Pourtant, il est là, parfait dans ma main.

Sauge hoche la tête, pensif. Puis il se penche à son tour, cherchant son propre galet. Peut-être commence-t-il à comprendre, à sa manière.

Je repense à notre père, Marron, toujours en train de façonner de nouvelles recettes à la boulangerie. Il dit souvent que chaque pain a son histoire, que chaque ingrédient y apporte un morceau du monde. Peut-être que mes galets sont comme ses pains. Un souvenir que je peux emporter partout, une petite part de la rivière qui reste avec moi.

Nous restons là un moment, le bruit de l’eau autour de nous. Sauge trouve enfin un galet qui lui plaît. Il le soulève, l’examine sous toutes ses coutures, puis le glisse fièrement dans sa poche. « Je vais l’amener à l’école. Comme toi. »

Je souris. Le pain chaud que j’ai emporté de la boulangerie est presque froid maintenant. Mais ce n’est pas grave. Il sera parfait pour la collation du matin.

Avec mon galet dans ma poche, la forêt semble plus douce, et l’école, un peu moins impressionnante. Comme si ce petit poids dans ma patte m’ancrait, me rappelait que tout ira bien. Que, comme l’eau qui coule sans se presser, je peux avancer à mon propre rythme. Je serre mon galet une dernière fois, inspire profondément l’air frais du matin et me mets en route. Aujourd’hui sera une belle journée.

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